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Textes d'opinion

Une réforme fiscale dans le bas de Noël des Québécois?

Noël est à nos portes. Les plats traditionnels qui égaieront les soupers en famille mijotent dans les chaumières. Certains partiront vers les destinations soleil. Les achats de cadeaux vont bon train, surtout à la dernière minute.

En décembre, c’est bien connu, les commerçants font des affaires d’or. L’an dernier, un sondage montrait que les Québécois comptaient dépenser 1060 dollars en achats de Noël en moyenne. Au passage, les gouvernements en profitent aussi avec d’importantes recettes perçues en taxes de vente sur ces achats du temps des Fêtes, soit environ 138 $ par consommateur. C’est sans compter les taxes spéciales sur les billets d’avion, l’essence, l’alcool, etc.

Sur le plan des taxes de vente, le Québec impose un taux parmi les plus élevés, soit 14,975 %. Au Nouveau-Brunswick (15 %), la situation est similaire. Elle est un peu plus avantageuse en Ontario (13 %). Par contre, au sud de notre frontière, les États de New York (8,49 %), du Vermont (6,17 %) et du Maine (5,5 %) sont beaucoup moins gourmands. Le New Hampshire n’impose quant à lui aucune taxe de vente.

Parce que beaucoup de gens vont magasiner de l’autre côté des frontières, la concurrence fiscale des États limitrophes empêchent le gouvernement du Québec de trop hausser les taxes de vente. Le commerce en ligne, où les taxes ne sont pas toujours perçues, rend aussi périlleuse toute hausse de la taxe de vente du Québec.

La proposition du Rapport Godbout

Pourtant, suite à la publication du rapport du professeur Luc Godbout il y a près de deux ans, le gouvernement a sérieusement considéré d’augmenter les taxes à la consommation. Cette ambitieuse réforme de la fiscalité québécoise aurait mené à une hausse du taux des taxes de vente à 16 % et à l’augmentation des taxes spécifiques sur l’alcool, le tabac, l’essence et les assurances, mais aurait aussi permis une réduction équivalente de l’impôt sur le revenu des particuliers.

La réforme proposée était en effet neutre sur le plan des recettes fiscales, c’est-à-dire que le gouvernement n’aurait pas disposé de plus ou de moins de revenus. Toute baisse du niveau de la fiscalité québécoise aurait aggravé le déficit qui prévalait au moment de son dévoilement.

L’avantage d’une telle réforme était qu’en repensant le poids relatif des taxes à la consommation et des impôts, le gouvernement aurait stimulé la croissance économique. En effet, l’impôt sur le revenu des particuliers et l’impôt sur le revenu des entreprises pénalisent le travail et l’investissement, les moteurs de l’activité économique. En taxant relativement plus la consommation, on taxe les dépenses plutôt que les revenus, ce qui favorise l’épargne.

Les recommandations du rapport Godbout se sont toutefois finalement échouées sur l’écueil de la concurrence fiscale. Malgré un accueil favorable de la part du ministre des Finances, Carlos Leitão, elles n’ont jamais été mises en œuvre devant le tollé créé chez les commerçants de détail qui craignaient de ne plus être compétitifs.

Une réforme encore plus positive

Maintenant que les finances publiques du Québec sont à nouveau en équilibre et qu’un faible surplus est dégagé, il serait toutefois possible de réduire le fardeau des impôts selon les recommandations du professeur Godbout, tout en laissant tomber la hausse des taxes à la consommation.

Au lieu d’être neutre sur le plan des recettes de l’État, une telle mesure coûterait à l’État 2,7 milliards de dollars, ce qui est peu sur des revenus totaux de 102,3 milliards de dollars cette année.

On modifierait de la même façon le poids relatif des taxes et impôts, avec les avantages que cela entraîne pour la croissance économique. Mais compte tenu de la concurrence fiscale de nos voisins, on éviterait ainsi les effets négatifs d’une hausse des taxes à la consommation, tout en bénéficiant des effets positifs d’une baisse de l’impôt sur le revenu. L’économie, les consommateurs et les commerçants du Québec s’en porteraient tous mieux.

Youri Chassin est économiste et directeur de la recherche à l'Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.

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