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Les régimes forestiers du Québec : des leçons à tirer pour renouer avec la prospérité

Au fil du temps, le gouvernement du Québec a modifié à plusieurs reprises le régime forestier qui encadre les activités de l’industrie forestière. Ce Cahier de recherche fait un retour historique sur le régime des concessions, le régime des CAAF, et les principaux événements qui ont influencé le nouveau régime forestier de 2013. Il propose aussi des pistes de réforme s’inspirant des éléments positifs des anciens régimes et des pratiques d’ailleurs.

Communiqué de presse : La compétitivité du secteur forestier menacée par le nouveau régime forestier
 

En lien avec cette publication

Un régime forestier à réformer (Le Quotidien, 28 octobre 2016)

L’arbre qui cache la forêt (Blogue de l'IEDM du Journal de Montréal, 31 octobre 2016)

Entrevue avec Alexandre Moreau (Des matins en or, Radio-Canada, 27 octobre 2016)  

Les régimes forestiers du Québec : des leçons à tirer pour renouer avec la prospérité

Points Saillants

Au fil du temps, le gouvernement du Québec a modifié à plusieurs reprises le régime forestier qui encadre les activités de l’industrie forestière. Ce Cahier de recherche fait un retour historique sur le régime des concessions, le régime des CAAF, et les principaux événements qui ont influencé le nouveau régime forestier de 2013. Il propose aussi des pistes de réforme s’inspirant des éléments positifs des anciens régimes et des pratiques d’ailleurs.

Chapitre 1 – La gestion des terres forestières publiques : du laisser-faire au contrôle étatique

 

  • En 1826, on voit l’émergence du premier régime forestier formel au Québec, soit le régime des concessions forestières, selon lequel le gouvernement accordait un droit de coupes exclusif sur les arbres situés dans les limites de la concession.
  • Étant presque l’équivalent d’un propriétaire, le concessionnaire avait avantage à investir et à exploiter durablement les forêts qui lui étaient octroyées puisque la profitabilité à long terme de son entreprise en dépendait.
  • Même si le régime de concessions forestières avait plusieurs éléments positifs, le gouvernement affirmait dès le début des années 1960 que les droits de coupes exclusifs sur toutes les essences accordés aux propriétaires de concession ne permettaient pas d’exploiter le plein potentiel des forêts publiques.
  • En 1974, le gouvernement procédera à la révocation graduelle des concessions forestières par sa Loi modifiant la loi des terres et forêts, et entre 1972 et 1985, la superficie des concessions a diminuée de 36 %.
  • En adoptant la Loi sur les forêts en 1986, le gouvernement mettait définitivement un terme au régime des concessions forestières qui prévalait depuis plus de 150 ans, redéfinissant la répartition des responsabilités entre les entreprises et le gouvernement de sorte que ce dernier occupait maintenant un rôle prépondérant sur le plan de l’aménagement des forêts publiques.

Chapitre 2 – Centralisation des responsabilités et surexploitation de la ressource

  • La découverte de la forêt par les Québécois coïncide avec la montée d’une réticence face aux activités forestières à des fins commerciales, et dans un sondage mené en 1989, une part considérable de la population exprimait une attitude négative à l’égard de l’industrie forestière.
  • En dépit du fait que la détermination des volumes de bois disponible à la récolte était ultimement sous la responsabilité du ministère et non des intervenants privés depuis l’introduction du régime des CAAF en 1986, plusieurs accuseront les compagnies forestières d’être responsables de la potentielle sur-exploitation des forêts publiques au début des années 2000.
  • Comme le révélait le Vérificateur général du Québec en 2002, c’était effectivement le ministère des Ressources naturelles qui n’assumait pas bien ses responsabilités.
  • La Commission Coulombe a démontré par après que les estimations de possibilités forestières du gouvernement étaient beaucoup trop optimistes et, par conséquent, que les objectifs de récolte étaient trop élevés relativement à la capacité de régénération de la forêt.
  • Les directives du gouvernement visant à faire augmenter la récolte forestière ont donc certainement contribué à la baisse de 22 % des stocks de bois pour les essences résineuses entre 1970 et 2008, mais cette baisse des stocks a cependant été compensée par une récolte forestière considérablement affaiblie pour les années subséquentes en raison de la crise financière et de la baisse des mises en chantiers résidentielles aux États-Unis et au Canada.
  • Étonnamment, même si les critiques formulés par la Commission Coulombe et le Vérificateur général s’adressaient au ministère, elles ont mené à une centralisation pratiquement complète de la gestion forestière entre les mains des organismes gouvernementaux.

Chapitre 3 – La réforme du régime forestier dans un contexte de crise

  • En raison du conflit du bois d’œuvre résineux entre le Canada et les États-Unis et de la crise économique de 2008, des milliers d’emplois ont été perdus dans l’industrie forestière et plusieurs usines ont dû cesser leurs activités.
  • C’est dans ce contexte de crise qu’une autre importante refonte du régime forestier a été entreprise qui a culminé avec l’adoption de la Loi sur l’aménagement durable du territoire forestier en 2013.
  • Une infime partie des volumes de bois répertoriés en forets publiques sont annuellement récoltés, soit un peu moins de 1 % depuis 1990.
  • La vision à court terme qui caractérise les garanties d’approvisionnement sous l’actuel régime et les variations souvent à la baisse des volumes de bois alloués en forêts publiques viennent décourager les investissements qui nécessitent une planification dans un horizon éloigné.
  • Neuf ans après son entrée en vigueur, il est estimé que l’Accord sur le bois d’œuvre résineux entre le Canada et les États-Unis a réduit de 7,78 % les importations de bois d’œuvre en provenance du Canada lorsque les tarifs étaient appliqués.
  • Cette réduction a coûté plus de 2 milliards de dollars au secteur forestier canadien et 6,36 milliards de dollars aux consommateurs américains, tandis que les producteurs de bois d’œuvre américains ont réalisé des gains de 4,63 milliards de dollars.
  • Les régions forestières du Québec ont souffert d’un contexte économique défavorable à l’industrie du bois depuis le début des années 2000, mais en dépit de ce déclin, la foresterie demeure un secteur d’activité important dans l’économie des régions québécoises.

Chapitre 4 – Pistes de réforme pour un régime forestier plus compétitif

  • La centralisation des responsabilités d’aménagement des forêts publiques en 2013 a été présentée par le gouvernement comme une amélioration par rapport à l’ancien régime des CAAF qui permettrait de réaliser des économies d’échelles.
  • Les volumes de bois en forêts publiques étaient attribués sans limite de temps sous le régime des concessions et sur une période de 25 ans sous le régime des CAAF, mais actuellement, ils sont attribués seulement pour une période de 5 ans ou moins selon la volonté du ministre.
  • Le court-termisme du nouveau système fait que les détenteurs de garanties d’approvisionnement doivent maintenant planifier leurs opérations et investissements sur de très courtes périodes de temps, ce qui rend l’approvisionnement difficilement prévisible et exacerbe le risque lié aux investissements et à l’embauche de la main d’œuvre.
  • D’après une étude du Groupe DDM menée plus d’un an après la mise en œuvre du nouveau régime forestier, il s’est avéré qu’aucune économie n’a été réalisée et que des exploitants ont même observé une augmentation des coûts.
  • Entre 2010 et 2014, les redevances payées par les exploitants québécois ont plus que doublé, et sont maintenant presque deux fois plus élevées que celles payées par leurs compétiteurs ontariens.
  • À l’étranger, les usines disposent généralement d’une plus grande latitude dans l’élaboration des plans d’aménagement forestier et d’un horizon plus long qui facilite la planification des investissements.La tendance à la centralisation qui caractérise les réformes depuis les années 1970 devrait être renversée pour permettre une plus grande latitude aux exploitants sur le terrain.

Introduction

Les enjeux auxquels le secteur forestier du Québec fait face sont nombreux et ne datent pas d’hier. On peut notamment penser au conflit du bois d’œuvre entre le Canada et les États-Unis qui perdure depuis le début des années 1980, aux hypothèses contradictoires de sous-exploitation et de surexploitation de la ressource, et aux revendications sociales pour une plus grande intervention de l’État dans la gestion des forêts publiques depuis plusieurs décennies.

Au fil du temps, le gouvernement du Québec a répondu à ces pressions et défis en modifiants à plusieurs reprises le régime forestier qui encadre les activités de l’industrie forestière. L’abolition graduelle des concessions forestières à partir des années 1970 a marqué un point tournant. À partir de ce moment, on a observé une tendance à la centralisation des responsabilités entre les mains du ministère responsable des forêts et des différentes organisations qu’il chapeaute. Aujourd’hui, les exploitants n’ont pratiquement plus aucune responsabilité et la compétitivité des usines dépend en grande partie du travail des fonctionnaires.

Le premier chapitre de ce Cahier fait un retour historique sur le régime des concessions pour mettre en lumière certains de ses éléments positifs et déboulonner des mythes qui ont justifié une plus grande implication du gouvernement dans la gestion des forêts publiques. Le chapitre 2 se concentre principalement sur le régime des CAAF et l’hypothèse de surexploitation. Le chapitre 3 démontre l’importance économique du secteur forestier en région en mettant l’accent sur les principaux événements qui ont influencé le nouveau régime forestier de 2013. À partir de ces constats, le chapitre 4 cible les faiblesses du nouveau régime forestier et propose des pistes de réforme s’inspirant des éléments positifs des anciens régimes et des pratiques étrangères.

Ce Cahier de recherche est signé par Alexandre Moreau, analyste en politiques publiques à l’IEDM, avec la collaboration de Jasmin Guénette, vice-président de l’IEDM.

Lire le Cahier de recherche (en format PDF seulement)

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