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Textes d'opinion

L’été des « bonnes mauvaises idées »

Avec l'été qui s'achève, j'ai les « blues ». Il a fait beau et cette saison a été propice à des activités de toutes sortes. Dans le monde politique, on en a aussi profité pour lancer de nouvelles idées et réfléchir à voix haute. Trois idées, notamment, se sont démarquées dans l'actualité. On a beaucoup parlé du salaire minimum à 15 $, mais aussi du revenu minimum garanti. Et plus récemment, de la journée de travail de 6 heures. Vous ne m'en voudrez pas de passer outre l'idée de Martine Ouellet de nationaliser Internet, j'espère?

Si à première vue ces idées semblent avoir du mérite, quand on regarde de plus près, on constate qu'il s'agit en fait de « fausses bonnes idées ».

Le salaire minimum à 15 $

Une augmentation du salaire minimum à 15 $ serait certes une bonne nouvelle pour certains travailleurs au salaire minimum, soit ceux qui seront assez chanceux pour conserver leur emploi après cette hausse. Ce serait par contre une mauvaise nouvelle pour ceux dont le niveau de productivité est faible (et inférieur à 15 $ l'heure) et à qui on dirait essentiellement : il est illégal pour vous de travailler! Car oui, c'est plate, mais un salaire minimum veut dire que l'on rend essentiellement illégal le travail de ceux dont la productivité – c'est-à-dire la valeur de leur travail pour l'employeur – est inférieure au niveau légal fixé.

De plus, ce serait une mauvaise nouvelle pour les propriétaires de petits commerces et leurs familles, dont les marges bénéficiaires réelles sont souvent infimes et qui devraient travailler encore plus d'heures afin de remplacer des employés plus coûteux, tandis que ces derniers travailleraient moins.

La journée de travail de 6 heures

La Suède a adopté récemment cette mesure, un peu comme la France l'avait fait il y a plusieurs années avec la semaine à 35 heures, et maintenant on en parle au Québec. On répète qu'une semaine plus courte motive les salariés et les rend plus productifs. Vraiment? Travailler moins ne signifie pas nécessairement être plus productif. Des mesures comme celle-ci ont plutôt l'effet d'alourdir le processus d'embauche, les frais que les entreprises doivent payer en formation, en transfert de connaissance, pour modifier la logistique et la machinerie, etc.

De plus, si le temps supplémentaire doit commencer à être payé après la 30e heure, on risque de voir beaucoup de gens qui vont soudainement vouloir travailler 40 heures… comme avant.

Si on veut des gens plus motivés au travail, assurons-nous plutôt que les travailleurs puissent garder une plus grande portion du fruit de leur labeur et que le marché du travail soit flexible, permettant aux gens de trouver facilement du travail, voire de changer de travail pour un autre qui correspond mieux à leurs intérêts et habiletés.

Le revenu minimum garanti

Il s'agit de la plus mauvaise des soi-disant bonnes idées. Par malheur, l'Ontario veut en faire un projet pilote bientôt. Sans grande surprise, un sondage mené auprès des Canadiens indique qu'entre 57 % et 67 % des répondants seraient en faveur d'un programme canadien de revenu garanti de 10 000 $. L'appui grimpe à 65 % pour un programme de revenu minimum de 20 000 $ par année, et à 65 % pour un revenu annuel de 30 000 $.

Quelque chose me dit que si on monte la barre encore un peu, disons à 45 000 $, il y aurait encore plus de gens qui seraient pour! Même moi je commencerais à être tenté…

Ces résultats ne devraient guère surprendre. Tout le monde souhaite avoir un lunch gratuit! Malheureusement, il n'y a rien de gratuit en ce bas monde. Pour donner 30 000 $ à une personne sans qu'elle n'ait besoin de travailler, il faut que quelqu'un, quelque part, paye. Et la plupart du temps, ce sont les contribuables de la classe moyenne, par des taxes et des impôts supplémentaires, qui assument le coût de la facture.

Mais, imaginez si on donne soudainement 30 000 $ à tout le monde, dans un contexte où les gens sont déjà surtaxés et nos gouvernements surendettés. Est-ce que le gouvernement pourra continuer à offrir le même filet social? Pour trouver l'argent, faudra-t-il abolir les garderies subventionnées? Vendre les écoles? Privatiser les hôpitaux? Vendre Hydro-Québec? Installer de nouveaux péages?

En économie, une leçon de base est qu'il faut porter une grande attention non seulement à ce qui est visible, mais aussi, et surtout, à ce qui ne l'est pas. Le politicien et polémiste français Frédéric Bastiat nous l'a appris il y a bien longtemps déjà. C'est ce à quoi je fais référence lorsque je parle des effets « inattendus » de telle ou telle politique publique.

Maintenant, des vraies bonnes idées, ça existe. Si on veut améliorer le sort de pauvres, nos élus devraient, notamment, adopter les réformes suivantes :

Abolir la gestion de l'offre, qui coûte cher aux plus pauvres.

Abolir les commissions scolaires, pour que les élèves puissent mieux réussir leurs études et arriver sur le marché du travail avec les meilleures compétences qui soient.

Baisser les taxes et les impôts, pour que les familles du Québec puissent en avoir plus dans leurs poches.

– Permettre plus facilement le démarrage de petites entreprises comme celle des camions de bouffe de rue, pour ne prendre qu'un exemple. Et j'en ai beaucoup d'autres comme ça.

On peut certes débattre de ces idées, mais au moins elles ont le mérite de ne pas reposer sur la croyance selon laquelle l'argent pousse dans les arbres, et qu'on pourrait tous avoir un lunch gratuit si seulement le gouvernement acceptait de nous donner 30 000 $ sans rien faire…

Jasmin Guénette est vice-président de l'Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.

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