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Textes d'opinion

Comment attirer les entreprises au Québec et les retenir?

Le journal Les affaires publiait il y a quelques semaines une enquête à propos des sommes dépensées par le gouvernement provincial pour attirer les entreprises au Québec. François Normand y explique qu’il n’existe pas de chiffre officiel pour ces dépenses et avance une première estimation de 647 millions ces 5 dernières années. Pourquoi doit-on dépenser autant d’argent pour séduire les entreprises et les convaincre de rester?

Parmi les sommes dépensées la majorité, soit 540 millions de dollars, sont le fait d’Investissement Québec, qui dit s’impliquer à hauteur de 10 % pour attirer ou retenir les projets d’investissement étrangers entre 2011 et 2015. Montréal International, toujours selon le journaliste, consacre 50 % de son budget à l’attraction de sociétés étrangères, soit 22 millions de dollars entre 2010 et 2014. À cela il faut ajouter les dépenses de Québec International, pour 1,5 millions de 2011 à 2015, de Finance Montréal pour 79 millions de dollars et du ministère de l’Économie, de la Science et de l’Innovation pour 4 millions de dollars.

Dépenser autant pour attirer les entreprises constitue, d’une certaine façon, une admission que notre fiscalité est bien peu accueillante.

Dans une étude publiée conjointement avec l’Institut C.D. Howe, nous comparions le fardeau fiscal de l’investissement dans les plus grandes villes de chaque province. L’étude montre que Montréal est une des grandes villes canadiennes où l’investissement est le plus taxé. Le taux effectif marginal d’imposition de l’investissement y est de 75,6 %. C’est donc dire qu’un dollar supplémentaire de revenus de l’investissement est taxé à hauteur de 76 cents à Montréal. Les principaux impôts responsables sont les taxes locales assimilables aux taxes foncières, parmi lesquelles les taxes municipales comptent pour la quasi-totalité.

Bien que cette étude ne s’intéresse qu’à Montréal, alors que le décompte des dépenses des Affaires s’intéressait à toute la province, il n’est pas surprenant que les entreprises ne veuillent pas investir ici, ou souhaitent désinvestir. Par comparaison, le taux effectif marginal d’imposition de Calgary n’est que de 45,1 %. Entre 45 et 75 % de taux effectif marginal d’imposition, le choix est vite fait et il ne s’agit pourtant là que des autres villes canadiennes. La concurrence pour attirer les entreprises est, elle, mondiale.

Ce qui est dommage, c’est que dans les classements sur d’autres critères le Québec, ou du moins Montréal puisque ces études ne s’intéressent la plupart du temps qu’aux métropoles, brille par son attractivité. Par exemple, une étude de KPMG confirmait que Montréal est une ville parmi celles où les coûts d’exploitation sont les plus bas au monde. Les coûts d’installation, du travail, du transport et de la distribution, des services publics, du financement, ainsi que les impôts liés à l’exploitation sont parmi les moins chers. C’est bien pour Montréal, mais ce qui détermine les décisions sur l’endroit où implanter une entreprise, c’est aussi la rentabilité de l’investissement. Malheureusement, lorsqu’il s’agit de l’investissement, on se tire dans le pied avec des impôts et taxes trop élevés. On aura beau dépenser des millions, tant que notre fardeau fiscal de l’investissement ne sera pas comparable avec ce qui se fait ailleurs les entreprises ne se bousculeront pas pour venir s’installer ici.

On dépense donc beaucoup pour attirer et retenir les entreprises, mais en même temps, notre fiscalité élevée agit contre cet objectif. Il serait plus simple et certainement plus efficace d’attirer et retenir les entreprises en ayant des taxes et impôts moins élevés, ou du moins si Montréal avait des taux d’imposition comparables aux autres grandes villes canadiennes.

Mathieu Bédard est économiste à l'Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.

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