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Textes d'opinion

Lettre d’amour aux enseignants québécois

Les réactions à la Note économique que j’ai publiée au début de cette semaine sur la valorisation de la profession enseignante ont été nombreuses et très souvent positives. Sauf de la part des syndicats et de quelques personnes. Ce n’est pas surprenant, mais c’est décevant, parce qu’on a parfois l’impression d’être critiqué par des gens qui n’ont pas lu notre publication et qui caricaturent nos constats alors que la valorisation des enseignants devrait être du nombre de leurs préoccupations.

J’aimerais prendre quelques instants, non pas pour répondre à toutes les critiques, mais pour déclarer mon amour aux enseignants québécois. C’est sans doute ce qui est le plus laissé de côté dans les analyses et les commentaires. Pourtant, j’ai eu l’occasion de parler avec de nombreux enseignants avant la parution de la Note et depuis.

Rappelons que l’immense majorité des enseignants québécois sont très compétents. Et plusieurs sont exceptionnels. J’ai en tête plusieurs enseignants marquants de mon propre parcours scolaire qui ont stimulé ma curiosité (merci Gia!), qui m’ont fait découvrir des faits scientifiques fascinants (merci M. Labib!), qui ont su me proposer des lectures marquantes (merci Nicole!), etc.

Les enseignants travaillent dans un milieu qui n’est pas simple ni facile. Le système scolaire est parfois tellement bureaucratique. Je pense aux enseignants qui finissent par acheter eux-mêmes du matériel scolaire parce que les fonds ne sont pas bien alloués par les administrateurs. Je pense aux enseignants qui font preuve d’une sainte patience et d’une homérique persévérance avec des élèves qui ont des difficultés d’apprentissage.

Ces obstacles existent bel et bien. Ça ne simplifie pas le travail de ces héros du quotidien dans leurs efforts pour transmettre aux jeunes générations les connaissances, le savoir-être et le savoir-faire qui leur permettront de réaliser leur potentiel.

Une autre réalité qui empoisonne les milieux de travail des enseignants, et les milieux d’apprentissage de nos enfants, c’est la complaisance envers l’incompétence d’une infime minorité. Ce n’est pas parce que les profs incompétents sont peu nombreux qu’ils ne sont pas terriblement nuisibles!

Bien entendu, leur présence nuit d’abord aux élèves qui comptent sur leurs enseignants pour apprendre et se développer. La compétence du prof est vue comme le critère le plus important de réussite dans la population québécoise. Mais il ne faut pas sous-estimer l’impact négatif d’un enseignant incompétent sur l’équipe-école dans son ensemble. Ses collègues qui se dévouent pour les jeunes doivent travailler d’autant plus fort, compenser les retards dus à un enseignement déficient, endurer un collègue qui ne souhaite pas s’améliorer, etc. Ça non plus, ce n’est pas facile.

C’est d’autant plus déplorable puisque ces rares individus dévalorisent toute la profession enseignante. On l’oublie peut-être, mais le titre de la publication de l’IEDM faisait justement référence à la valorisation de la profession enseignante, ce que les syndicats réclament depuis des années.

Voilà, c’est dit : j’aime les enseignants. J’irais même plus loin pour dire que je respecte le travail des syndicats dans bien des cas, lorsque c’est une protection juste. D’ailleurs, je commets l’affirmation suivante : « les enseignants ont le droit d’être assistés et [il] est parfaitement normal et souhaitable qu’ils puissent faire appel à leurs syndicats pour les défendre dans les circonstances [d’un congédiement] ». Cette phrase est tirée de ma Note économique. Et je le pense pour vrai.

Ça n’excuse pas les exemples de syndicats belliqueux qui défendent l’indéfendable, mais il y a du bon aussi dans leur travail, notamment de défendre les enseignants contre l’arbitraire. Les directions d’école ne sont pas toutes parfaitement compétentes non plus. La dernière chose qu’on souhaite, c’est que les enseignants aient l’impression d’être soumis à des évaluations injustes ou biaisées.

Eh oui, que voulez-vous, je suis plus nuancé que l’image que m’accolent mes critiques. Et c’est sans doute un peu grâce à Gia, M. Labib, Nicole…

Youri Chassin est économiste et directeur de la recherche à l'Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.

Lire le billet sur le site du Journal de Montréal

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