fbpx

Textes d'opinion

Le gouvernement s’entête: encore une taxe rétroactive!

Vous vous souvenez de l'idée du gouvernement actuel d'imposer les contribuables de façon rétroactive? Cela avait suscité tout une controverse dans les premières semaines de ce nouveau gouvernement. Eh bien, le ministre des Finances remet ça! Cette fois, ce sont les restaurants et les bars qui sont touchés.

La bière, le vin et les autres alcools sont taxés différemment des autres produits puisqu'en plus des taxes de vente, un bar ou un restaurant doit y ajouter une taxe spécifique. Contrairement à la taxe de vente, cette taxe est réclamée au commerçant avant même que celui-ci n'ait eu la chance de vendre cet alcool à ses clients.

Dans son budget du 20 novembre, Nicolas Marceau a choisi d'augmenter cette taxe spécifique à partir du 21 novembre, à 3 heures du matin. C'est précis comme ça dans le budget : la date ET l'heure! Sauf que ce tout l'alcool déjà en stock – qui a donc été acheté AVANT le budget – est soumis lui aussi à la nouvelle taxe rétroactive!

En toute logique, un restaurateur avec quelques bouteilles de vin ou d'alcool en stock se dira qu'à partir du 21 novembre, il doit augmenter ses prix en conséquence. Les nouvelles bouteilles qu'il commande à la SAQ lui coûtent plus cher, alors il les vend plus cher aussi.

Ce n'est pas si simple comme opération, comme le souligne l'Association des restaurateurs du Québec : il faut changer la carte des vins, les menus, les spéciaux des fêtes, les réservations déjà faites, etc. Ce n'est pas simple, et ce n'est peut-être même pas une bonne idée. Mais, au moins, tout le monde comprend la logique de l'affaire.

La véritable injustice, le pompon, la cerise sur le sundae, le clou dans le cercueil, c'est la rétroactivité. C'est changer après coup le prix de l'alcool qui a déjà été vendu!

Aussi incroyable que ça puisse paraître, le ministre nie que cette taxe soit rétroactive. Son point de vue, c'est que la taxe est payée par les clients des établissements détenant un permis d'alcool, pas par les commerçants. Puisque l'alcool n'a pas encore été vendu aux clients, on ne taxe pas des transactions passées. Sauf que cette explication ne tient pas la route.

Les fonctionnaires et le ministre peuvent bien souhaiter que la taxe soit assumée par les clients, ils facturent tout de même… le commerçant! Et puis le gouvernement, avec son appétit sans borne pour de nouveaux revenus, exige que les taxes sur les bouteilles en stock soient payées avant même qu'elles ne soient vendues aux clients. On donne même jusqu'au vendredi 21 décembre 2012 aux bars et aux restaurants pour envoyer le chèque au gouvernement. Un mois!

En somme, la transaction qui exige qu'un montant soit versé au gouvernement, c'est l'achat d'une bouteille d'alcool par le bar ou le restaurant. Après, même s'il fait faillite sans avoir vendu sa bouteille (9 restaurants sur 10 ne survivent pas 10 ans), qu'on ne vienne pas demander au gouvernement de rembourser!

Puisqu'il faut répéter plusieurs fois la même chose pour être compris, semble-t-il, redisons donc à M. Marceau que la rétroactivité est profondément injuste.

Un coup parti, jusqu'où ira le gouvernement? Je pense que je vais acheter des cadeaux de Noël et ajoutant 10 % aux prix de vente, au cas où M. Marceau décide d'augmenter les taxes sur les achats de Noël en janvier, rétroactif en décembre!

Et les restaurateurs, eux? Est-ce qu'ils peuvent facturer rétroactivement leurs clients pour l'alcool bu avant le 21 novembre? J'arrête la liste avant d'arriver aux élections rétroactives…

Youri Chassin est économiste à l'Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.

Back to top