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Textes d'opinion

Le sirop d’érable en otage

L’arrivée du printemps au Québec se reconnaît aussi au temps des sucres, cette période de réjouissance où chacun peut fêter la fin de l’hiver en dégustant de la tire sur neige et autres produits acéricoles. Malheureusement, tout n’est pas parfait au pays de l’érable.

En effet, depuis 2002 la mise en marché des produits de l’érable au Québec est contrôlée par un système de gestion de l’offre. La Fédération des producteurs acéricoles, un syndicat agricole, possède un pouvoir de monopole sur la mise en marché du sirop d’érable. Un producteur de sirop d’érable doit dorénavant obtenir la permission de cette fédération pour pouvoir transformer et mettre en marché ses propres produits, en plus de payer des frais de mise en marché et des cotisations. La quantité de sirop d’érable produite est limitée par son quota, s’il en détient un. Dans le cas contraire, il lui est interdit de produire. Si le producteur était membre d’une coopérative comme Citadelle pour transformer et mettre en marché son produit, il n’a plus le droit de livrer lui-même sa production à sa coopérative. Celle-ci, pour s’approvisionner, doit négocier avec la fédération centralisée et le sirop livré ne proviendra pas nécessairement de ses membres.

Les quotas ont été mis en place dans le but de limiter la quantité de sirop d’érable produite et ainsi d’augmenter le prix du produit à la sortie de la ferme.

Ce système comporte deux faiblesses majeures. Premièrement, il encourage la confrontation plutôt que la coopération entre fournisseurs et acheteurs dans la filière agroalimentaire. La coopération est pourtant nécessaire pour que chaque maillon de la chaîne remplisse adéquatement son rôle en vue de satisfaire les besoins des consommateurs. Des fournisseurs doivent continuellement se préoccuper de bien connaître ce que veulent les acheteurs de leurs produits et entreprendre de faire le nécessaire pour les satisfaire. Au contraire, la gestion de l’offre crée une rupture entre les producteurs et les consommateurs.

Deuxièmement, augmenter artificiellement le prix à la ferme des produits de l’érable a des conséquences. Même si le Québec a depuis longtemps été le principal producteur de produits de l’érable à l’échelle mondiale, il n’est pas le seul. Le Nouveau-Brunswick, l’Ontario et des États de la Nouvelle-Angleterre comptent également leur lot de producteurs. Qu’arrivera-t-il si le prix à la ferme fixé au Québec est supérieur à celui qui prévaut dans les autres régions productrices?

En bref, le système de gestion de l’offre est improductif. D’une part, les consommateurs paient plus cher pour les produits de l’érable. D’autre part, les exportations sont moins concurrentielles et le système rend plus difficile la diversification de la production. Dans ce secteur comme dans bien d’autres, la bureaucratie sclérosante doit être remplacée par une libéralisation propice à l’innovation.

Mario Dumais est chercheur associé à l’Institut économique de Montréal, ex-directeur des publications de l’UPA et membre de la Commission Pronovost.

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