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Textes d'opinion

L’Amérique en déroute

Dans mon texte de la semaine dernière, j’ai mis en parallèle la contribution de l’économiste F.A. Hayek et le bilan de la révolution bolivarienne entreprise par Hugo Chávez après son élection en 1998. Tout bien considéré, l’expérience du Venezuela a donné raison au célèbre économiste: les réformes socialistes entraînent effectivement les peuples sur la «route de la servitude». Le líder de Caracas est un triste exemple d’un chef d’État qui, au nom d’une plus grande justice sociale et d’une meilleure redistribution des richesses, adopte des politiques publiques qui détruisent l’économie et briment les libertés individuelles.

Le président américain, Barack Obama, devrait tirer des leçons de cette expérience funeste et éviter à tout prix le piège de l’interventionnisme à outrance. La tradition de liberté personnelle, tant sur le plan social qu’économique, qui a permis aux États-Unis de devenir la première puissance économique mondiale, ne doit surtout pas être abandonnée.

Pourtant, depuis bientôt deux ans, l’administration Obama a montré à maintes reprises et de multiples façons qu’elle croit fermement que l’État doit déployer ses tentacules dans toutes les sphères de l’économie, qu’il doit décider, surveiller, contrôler, et imposer.

Pour preuve, Washington compte déjà plus d’une trentaine de «tsars», plus que n’importe quelle autre administration auparavant. Les «tsars» sont des hauts fonctionnaires nommés exclusivement par le président. Ils n’ont de comptes à rendre à personne sauf à lui et sont exempts de la supervision du Congrès et de la Cour suprême.

De plus, avec ses plans pour relancer l’économie et sauver l’industrie automobile, les prêts hypothécaires, Wall Street, les prêts étudiants, l’industrie de la pêche et, bien entendu, les soins de santé, la nouvelle administration a nationalisé une portion importante de l’économie.

En ce qui concerne la réforme de l’assurance maladie, la présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, a déclaré dans un discours le 9 mars dernier qu’il fallait d’abord adopter la nouvelle loi pour qu’on sache ce qu’elle contient. Peut-on imaginer une déclaration plus méprisante et plus contraire à l’esprit de la constitution? Le plus désolant, toutefois, c’est qu’elle avait raison!

En effet, on apprenait récemment que la réforme de l’assurance maladie adoptée le 23 mars dernier contient une disposition qui va obliger notamment les petites entreprises et les travailleurs autonomes à remettre au fisc un formulaire pour tout achat de biens et services supérieur à 600 $, même lorsqu’il est effectué auprès d’un particulier. Cette mesure va avoir un impact particulièrement grand sur les commerces qui achètent et revendent de l’or, un métal de plus en plus convoité en raison de la confiance décroissante envers le dollar américain.

On justifie cette mesure en prétextant qu’elle permettra au fisc de récupérer 17 milliards de dollars en dix ans, lesquels seront alloués au financement de la réforme de la santé. Or, la facture de cette dernière est estimée à près de 1000 milliards de dollars sur la même période! Pourquoi donc adopter une mesure relativement mineure sur le plan financier qui va forcer les entrepreneurs à remplir une énorme quantité de paperasse plutôt que se concentrer à croître et à prospérer?

Washington a adopté une série de mesures qui, prises individuellement, peuvent sembler inoffensives. Mais quand on les additionne toutes et que l’on considère le marasme économique dans lequel le pays semble englué, comment ne pas penser que les Américains roulent de plus en plus sur la «route de la servitude»?

Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l’Institut économique de Montréal.

* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.

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