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Textes d'opinion

L’empire assassiné

C’est fait! Le Sénat américain a adopté la réforme financière élaborée par le sénateur Christopher Dodd et le représentant Barney Frank.

Barack Obama en a fait l’annonce en déclarant que cette législation mettrait un terme aux «affaires louches», que «les Américains ne feront plus jamais les frais des erreurs de Wall Street», et que «les mesures adoptées représentent les plus fortes protections de l’Histoire».

Mais la réforme proposée mérite-t-elle réellement les superlatifs dont on la gratifie?

Tout d’abord, on nous dit que la loi Dodd-Frank vise à empêcher qu’une crise financière semblable à celle de 2008 ne se répète. Soit! Mais alors, comment expliquer que la loi ait déjà été rédigée et adoptée alors que la Commission d’enquête sur la crise financière, créée par le président Obama en mai 2009 afin d’identifier les causes de la débâcle, ne rendra ses conclusions que le 15 décembre prochain? Est-il vraiment raisonnable d’administrer un remède avant même de connaître le diagnostic?

Ensuite, la loi ne remet pas en question le rôle des organismes Fannie Mae et Freddie Mac. Ce n’est pas surprenant puisque messieurs Dodd et Frank se sont toujours vigoureusement opposés à toute réforme des deux géants créés par le gouvernement fédéral.

Pourtant, en achetant les hypothèques à risque, ces sociétés ont encouragé les institutions financières à consentir des prêts à des clients insolvables. Sans elles, la plupart des clients à risque auraient été incapables de contracter un emprunt.

Quant à l’orientation de la politique monétaire menée par la FED, la loi n’en fait aucune mention. Pourtant, le rôle joué par les taux d’intérêts ridiculement bas comme élément déclencheur de la crise n’est plus à prouver.

Finalement, soulignons que la version initiale de la loi, qui a circulé pendant plusieurs mois sans susciter d’opposition, contenait une clause inquiétante. Essentiellement, on voulait obliger toutes les banques américaines à enregistrer de manière détaillée et exhaustive chacune des transactions effectuées par leurs clients pour ensuite en faire rapport à l’État. Ce n’est qu’en mai dernier qu’un sénateur a enfin demandé un amendement.

Néanmoins, le simple fait qu’une telle clause ait été proposée n’est-il pas révélateur des véritables intentions de la loi?

Washington a commencé par nationaliser GM. Puis vint le tour des prêts étudiants et du système de santé, lequel représente un sixième de l’économie américaine.

Maintenant, le chef de la Maison-Blanche s’attelle au système financier. Sous le couvert d’intentions nobles, les mesures adoptées par la nouvelle administration visent l’appropriation de richesses et, surtout, la limitation des libertés. L’empire américain tel que nous le connaissons se meurt.

On assassine un système longtemps admiré et envié pour son respect des libertés individuelles et économiques pour faire place à Big Brother et à une idéologie franchement socialiste qui a pourtant causé ruine et désolation dans tous les pays où elle a été tentée.

Maintenant que les intentions de la nouvelle administration sont évidentes, ses prochaines cibles sont faciles à prévoir. Elle voudra contrôler les moyens de communications, puis les médias. C’est même déjà commencé alors que le gouvernement fédéral a révélé son projet d’espionner les communications Internet.

En effet, Washington entend légiférer pour obliger les fournisseurs de services Internet à divulguer aux autorités, sur demande et sans qu’elles aient à présenter un mandat, des données relatives aux activités de leurs clients.

Big Brother pourrait savoir à qui et quand des courriels sont envoyés, de même que l’historique de navigation de l’utilisateur.

Mais qu’attendent donc les Américains pour crier leur opposition et sauver leur pays pendant qu’il en est encore temps?

Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l’Institut économique de Montréal.

* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.

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