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Textes d'opinion

Les femmes: solidaires ou dépendantes?

Je ne peux m’empêcher de revenir sur le sondage CROP portant sur la générosité sociale des Québécois. Il semblerait que les Québécois n’adhèrent pas aux thèses des lucides et que les jeunes sont plus attachés que leurs parents à notre modèle social-démocrate… Du moins, ce sont-là les conclusions que les médias ont bien voulu nous rapporter.

En ce qui concerne l’attachement des jeunes au modèle québécois, il était prévisible. Georges Clémenceau disait que si on n’est pas de gauche à 20 ans, c’est qu’on n’a pas de cœur; si on l’est encore à 40 ans, c’est qu’on n’a pas de tête.

Les jeunes veulent les mêmes privilèges que ceux de leurs parents? Quoi de plus normal! Ils ne paient pas d’impôt et il est toujours facile d’être généreux avec l’argent des autres. Mais sont-ils conscients de tous les tenants et aboutissants de la générosité étatique? Combien d’entre eux connaissent les conséquences d’une dette élevée sur le niveau de vie d’un pays? Voilà des questions cruciales qui manquent au sondage!

Dans l’ensemble, le sondage demande aux répondants s’ils veulent plus ou moins de programmes sociaux, mais reste muet sur les coûts supplémentaires à assumer. Les réponses n’étaient-elles pas prévisibles? Et il faut être surpris des résultats?

Tarifs d’électricité

Quant au fait que 83% des Québécois sont défavorables à une hausse des tarifs d’électricité, il ne faut surtout pas y voir l’expression de valeurs sociales profondes. D’ailleurs, l’électricité bon marché bénéficie avant tout aux ménages bien nantis qui doivent éclairer 12 pièces, chauffer le garage triple et la piscine olympique. Soyons honnêtes, ce n’est pas le souci du voisin qui incite tant de gens à s’opposer à une hausse des tarifs d’électricité, mais bien celui de leur portefeuille.

Finalement, un fait notable, mais passé sous silence, ressort du sondage: les femmes semblent nettement plus «solidaires» que les hommes. Par exemple, elles représentaient 72% des répondants défavorables à la hausse des frais de scolarité, et 64% de ceux qui estiment que le gouvernement doit être le plus généreux possible dans les programmes sociaux.

Comme un peu partout à travers le monde, les femmes sont plus nombreuses que les hommes à promouvoir des valeurs de «solidarité», ce qui signifie qu’elles comptent sur l’État pour pourvoir à leurs besoins et à ceux de la population en général. Elles endossent un système qui déresponsabilise l’individu pour faire de lui un être fragile dont il faut prendre soin. Pourtant, plusieurs des femmes en faveur de l’État-nounou se disent également féministes, ce qui est paradoxal.

Féminisme

Le féminisme est associé à la libération de la femme et vise notamment à rompre le lien de dépendance qui existait jadis entre la femme et son époux. La femme voulait être maître de son corps et de sa destinée, ce qui est compréhensible. Or, si les femmes se sont affranchies de leurs époux, plusieurs d’entre elles ne sont pas «libérées» pour autant. Ce n’est plus aux hommes qu’elles attribuent le rôle de pourvoyeur, c’est à l’État.

Si l’on se fie au sondage, l’émancipation de la femme apparaît partielle. Il est vrai qu’il faut du courage pour être libre, car la liberté a pour corollaire la responsabilité. Tant que les femmes seront si nombreuses à défendre un système qui les déresponsabilise et qui transfère à l’État le soin de veiller à leur bien-être, elles seront dépendantes. Être une femme libérée, c’est ne pas dépendre de la générosité du gouvernement! On peut vouloir l’émancipation, on peut vénérer l’État-providence, mais on ne peut revendiquer les deux à la fois!

* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.

Nathalie Elgrably est économiste à l’Institut économique de Montréal et auteure du livre La face cachée des politiques publiques.

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