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Textes d'opinion

Suède: modèle ou mythe?

Confrontés aux retentissants échecs de l’interventionnisme, les partisans de l’État-providence tentent inlassablement de revamper leur discours en citant constamment l’exemple de la Suède. Selon eux, le «modèle suédois» combinerait la création de richesse inhérente au capitalisme, et la redistribution précieuse au socialisme. Mais est-ce réellement le cas?

En 1970, la Suède était le 4e pays le plus riche de la planète. Cette prospérité est d’autant plus impressionnante que les Suédois vivaient dans une misère abjecte jusque dans les années 1890. Or, ce n’est pas à l’interventionnisme qu’ils doivent cette formidable ascension de leur niveau de vie, mais plutôt à une fiscalité frugale, à l’ouverture au commerce international, aux excellentes conditions offertes aux entrepreneurs et à un gouvernement limité.

Fiers de leur réussite et décidés à créer une société plus égalitaire, les Suédois virent radicalement à gauche en 1970 afin de réaliser le modèle imaginé dans les années 1930 par Gunnar et Alva Myrdal, les parents intellectuels de l’État-providence. Les politiques sociales se multiplient, plusieurs réglementations sont introduites sur le marché du travail et les dépenses gouvernementales doublent en quelques années. Ces politiques étaient inspirées par de bons sentiments, mais elles ont néanmoins considérablement appauvri la Suède la faisant dégringoler à la 14e position des pays les plus riches. Si la Suède était un état américain, elle serait le 5e état le plus pauvre!

L’entrepreneuriat étouffé

Plus concrètement, l’État Père Noël a étouffé l’entrepreneurship et l’initiative. Parmi les 50 plus importantes compagnies suédoises, une seule est née après 1970. De 1970 à 1995, la Suède a enregistré un taux de croissance économique extrêmement faible, un désinvestissement net et aucune création nette d’emplois. Et bien que son taux de chômage officiel soit de 6%, de nombreuses sources démontrent qu’il dépasse 20% si l’on inclut les chômeurs qui échappent aux statistiques parce qu’ils participent à des programmes étatiques de formation ou de réinsertion, ont pris une retraite anticipée ou sont en congé de maladie artificiellement prolongé. Soulignons également l’épidémie d’absentéisme et la dégradation de leur système de santé. Voilà ce qu’est le «modèle suédois», et il ne s’agit là que de la pointe de l’iceberg!

La Suède a enregistré un taux de croissance économique de 2,5% de 1995 à 2005, certes. Mais certains oublient habilement de préciser que cette performance est le résultat des réformes pro-marché entreprises depuis 1995 et parmi lesquelles figurent la déréglementation des télécommunications, la privatisation totale ou partielle de plusieurs sociétés d’État, la décentralisation de l’éducation, l’introduction de la rémunération au mérite, la réforme du régime de retraite, la montée de la concurrence dans les soins de santé, la réduction des taux marginaux d’imposition, la réduction de l’appareil gouvernemental, etc.

Les années de prospérité qu’a enregistrées la Suède coïncident avec celles où régnait une relative liberté économique. Par contre, l’appauvrissement et la dégénérescence du système ont accompagné la montée de l’État Père Noël. Et dire que, des 115 dernières années de l’histoire de la Suède, c’est précisément cet épisode que certains ont choisi d’élever au rang de modèle!

La supériorité du «modèle suédois» n’est qu’un mythe savamment entretenu par la gauche soucieuse d’apporter de la crédibilité à des principes qui ont fait banqueroute. Attribuer les succès économiques de la Suède à l’État-providence est une fraude intellectuelle. Taire les réformes libérales entreprises il y a 10 ans, est un mensonge par omission. Cacher que le «modèle suédois» a survécu quelques temps grâce à la richesse accumulée pendant l’ère capitaliste qui l’a précédé, voilà qui relève carrément de la malhonnêteté. En définitive, s’il existe un «modèle suédois», c’en est un à éviter!

* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.

Nathalie Elgrably est économiste à l’Institut économique de Montréal et auteure du livre La face cachée des politiques publiques.

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