fbpx

Textes d'opinion

Remboursement de la dette: un mirage

Avec la création d’un «Fonds des générations», le ministre des Finances Michel Audet a voulu dans son budget de la semaine dernière répondre aux attentes de nombreux Québécois préoccupés par le poids de la dette. On doit toutefois se demander si ce Fonds n’est pas que de la poudre aux yeux qui n’aura qu’un effet marginal sur les finances publiques.

Que la dette soit de 17 ou de 117 milliards de dollars importe peu. Sa gravité dépend du revenu dont nous disposons, et la seule variable importante est le ratio de la dette par rapport au produit intérieur brut (dette/PIB). Pour réduire ce, il n’y a que deux façons: il faut contrôler la dette et/ou accroître le PIB.

Bien que M. Audet ait annoncé fièrement qu’il maintient le déficit zéro, la dette québécoise continue d’augmenter de 3 milliards par année, alors que le Fonds atteindra à peine 30 milliards en 2025.

Pseudo-équilibre budgétaire

Jamais un ministre des Finances ne se sera fait autant de capital politique avec une mesure budgétaire aux effets si marginaux! Il s’agit en fait d’un pseudo équilibre budgétaire, car bien que les recettes de l’État couvrent les dépenses courantes, elles demeurent insuffisantes pour financer les immobilisations et les mises de fonds dans la SGF et dans Innovatech, d’où la récente hausse de l’endettement.

On nous dit que la hausse de la dette est acceptable parce qu’elle permet de financer l’acquisition d’infrastructures. Cet argument est valable, mais il n’est plus recevable quand la dette impose un fardeau si lourd qu’il devient prioritaire de la réduire. Si M. Audet voulait sincèrement s’attaquer à la dette, il s’arrangerait pour l’empêcher d’augmenter. Et si les immobilisations lui tiennent vraiment à coeur, il devrait s’imposer de les payer à même ses recettes budgétaires, quitte à couper dans d’autres postes de dépenses. Mais cela voudrait dire faire des mécontents et nuire à la popularité de son parti.

Une diversion

Il ne reste plus que la croissance du PIB pour améliorer les perspectives d’avenir. C’est d’ailleurs grâce à elle que le Québec est aujourd’hui en meilleure posture qu’en 1998. La dette représente 44% du PIB, ce qui est indéniablement élevé. Néanmoins, l’obsession soudaine qu’elle suscite est surprenante quand on sait que peu de gens se souciaient de son existence en 1998 alors qu’elle atteignait un sommet 52,2%. On pourrait presque croire que notre gouvernement se sert de la dette comme moyen de diversion pour nous faire oublier qu’il ne tient pas sa promesse de réduire les impôts!

La prospérité passe par des réductions d’impôts notables, et c’est malheureusement ce qui manque dans le budget. Nous pourrions devenir plus compétitifs et inciter les gens à travailler et à investir plus en réduisant les impôts. Cela nous permettrait de nous enrichir plus vite et donc de réduire le poids relatif de la dette.

Mais nous sommes en partie responsables de la voracité de notre régime fiscal. Tant que la société québécoise se comportera comme un enfant qui s’attend à ce que ses parents subviennent à tous ses besoins, nous nous endetterons. Le «modèle québécois» transforme tous nos besoins en «droits», et transfère les responsabilités de l’individu vers l’État. Au lieu de nous retrousser les manches, nous comptons sur l’État pour qu’il s’occupe de nous.

Il ne faut pas donc se surprendre qu’il siphonne une partie importante de nos revenus et enregistre une dette croissante. Il est louable de se préoccuper du fardeau de la dette que supporteront nos enfants, mais encore faut-il que nous assumions nos responsabilités en tant qu’adultes.

* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.

Nathalie Elgrably est économiste à l’Institut économique de Montréal.

Back to top