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Textes d'opinion

Soins privés ou privé de soins?

La campagne électorale tire à sa fin et, bien que tous les candidats s’entendent pour dire que notre système de santé présente d’importants ratés, personne n’a osé proposer les solutions appropriées. Il faut dire qu’ils ont été très occupés à salir leurs adversaires!

Tous les partis veulent maintenir intacte le système de santé public actuel, et laissent croire aux électeurs qu’Ottawa solutionnera tous les problèmes en injectant des fonds supplémentaires et en collaborant avec les provinces.

Le socialisme de la santé mérite-t-il d’être autant défendu? Au nom de la solidarité et de la moralité, notre système «gratuit» coûte plus de 130 milliards par an, soit plus de 4000$ par personne. Pourtant, nous manquons de médecins, les équipements sont souvent obsolètes et insuffisants, et de nombreux patients meurent en raison des interminables listes d’attente.

Même les hôpitaux vétérinaires réussissent à accomplir ce dont nos hôpitaux sont incapables: ils dispensent à leurs «patients» les soins appropriés et ce, dans les meilleurs délais. Notre système permet donc à un chien de se faire soigner plus rapidement que son maître. Est-ce là notre conception de la solidarité et de la moralité? Injecter des fonds ne résoudra pas le problème. D’ailleurs, au chapitre des soins, le Manitoba dépense 21% de plus per capita que le Québec mais son système n’est guère plus enviable.

Le système public défend à quiconque d’acheter des soins hospitaliers, sous prétexte que riches et pauvres doivent être égaux devant la maladie. Mais cette équité n’est qu’une illusion et il faut être naïf pour croire que les malades gagnent à être tous dirigés vers le même réseau de soins. N’est-il pas évident que les listes d’attente seraient plus courtes dans les hôpitaux publics si des patients choisissaient d’aller se faire soigner dans des établissements privés qu’ils paieraient de leurs propres deniers? Non seulement les moins bien nantis obtiendront-ils plus rapidement des soins, mais le système disposerait de ressources additionnelles pour leur fournir un service de meilleure qualité.

Système à deux vitesses

Un système à deux vitesses, qui réduit les listes d’attente, n’est pas immoral. Par contre, ce qui est immoral c’est qu’un individu puisse s’acheter pour 15 000 $ de friandises s’il le souhaite tandis qu’on lui interdit de dépenser le même montant pour sauver sa vie ou celle d’un être cher. Soyons honnêtes et reconnaissons que le slogan inavoué du socialisme de la santé est «si je ne peux y avoir accès, personne n’y aura accès!»

Comme tous les Canadiens ne disposent pas des mêmes moyens financiers, on estime que chacun doit accepter de laisser sa santé se détériorer, peut-être même de manière irrémédiable, par compassion pour son voisin moins bien nanti. Selon cette logique, ne devrions-nous pas également nous priver de manger et de nous instruire par compassion pour ceux qui n’en n’ont pas les moyens?

Pourquoi ne pas essayer une autre approche qui consisterait à laisser payer ceux qui le peuvent, et à aider uniquement ceux dans le besoin? Pourquoi priver les Canadiens de la liberté de choisir entre se faire soigner dans un hôpital privé ou public?

Cette solution n’est pas populaire pour la bonne raison que les Canadiens sont sous l’emprise d’une gigantesque illusion collective, où chacun espère secrètement se faire soigner gratuitement, tout en se donnant bonne conscience en invoquant la solidarité. Quant aux politiciens, ils jouent à la fois sur l’égoïsme et sur le sentiment de compassion des électeurs. Malheureusement, ils sont trop peureux pour défendre l’idée qu’un système à deux vitesses avantagerait les pauvres autant que les riches.

Nathalie Elgrably est économiste à l’Institut économique de Montréal.

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