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Textes d'opinion

Peut-on vraiment hausser le fardeau fiscal des riches?

Jusqu’à tout récemment, il semblait n’y avoir qu’une seule solution à tous les problèmes socio-économiques du Canada: augmenter les taxes et créer un programme gouvernemental. C’est pourquoi les Canadiens, et spécialement les Québécois, sont aujourd’hui surtaxés.

Heureusement, cette foi dans l’intervention étatique perd des adeptes: selon un sondage publié en novembre 2001, 64% des Canadiens (et 74% des Québécois) préfèrent ravigoter l’économie par une baisse d’impôts plutôt que de gonfler de nouveau les dépenses.

Cela n’empêche pas les groupes de pression de réclamer de nouvelles interventions de l’État. Leur rengaine: augmentons les dépenses de l’État et faisons payer les riches. Selon les tenants de cette formule, les riches ne paient qu’un impôt minime grâce aux astuces de leurs fiscalistes. Taxer les riches, disent-ils, réglerait tout: amélioration des programmes sociaux, disparition de la pauvreté, relance de l’économie… Et n’oublions pas l’embauche de nouveaux fonctionnaires pour surveiller la couleur de la margarine!

Mais le Canada compte-t-il vraiment un si grand nombre de citoyens fortunés, pouvant être mis à contribution?

D’après les déclarations de revenus de 1998, on compterait au Canada 72 660 personnes dont les revenus dépassent les 250 000 $ par an. Ce n’est là que 0,3% des ménages ayant rempli une déclaration de revenus. Ces mêmes contribuables fortunés, malgré leur nombre infime, paient 15 G$ à l’État, soit 14% des impôts perçus au pays. Ils n’ont pourtant touché que 7% du revenu total des ménages, c’est-à-dire deux fois moins. Autrement dit, leur part des impôts représente le double de leur part des revenus. Leur taux moyen implicite d’imposition est ainsi de 36%. En comparaison, les personnes gagnant moins de 25 000 $ ont payé 8% des impôts alors qu’elles avaient gagné 23% des revenus, ce qui fait un taux implicite d’imposition de 7,6%. Et encore, si l’on ajoutait les autres taxes, la contribution des riches serait probablement encore plus grande.

Les programmes sociaux canadiens, toutes juridictions confondues, ont coûté 120 G$ en 1997, exclusion faite de l’éducation et de la santé. Si l’on ajoute ces deux derniers postes budgétaires, le montant passe à 240 G$, soit 60% des dépenses publiques totales. Supposons qu’on veuille augmenter ces dépenses d’«à peine» 10% – soit 24 G$ – et faire payer cette hausse par les «riches». Quel serait l’impact sur ces derniers? De combien augmenterait leur contribution? De 10%? 20%? ou 30%?

La réponse: 170%! Et même en supposant qu’une telle politique fiscale soit appliquée, est-il réaliste de croire que nous pourrions imposer cette hausse de 170% aux éléments les plus mobiles de la société sans les pousser à l’exode? Poser la question c’est y répondre.

Mais alors, ne pourrions-nous pas élargir un peu la définition de «riches» utilisée ci-haut et faire payer tous ceux qui ont un revenu annuel brut de plus de… 70 000 $ par année?

Voyons voir. Selon Statistique Canada, en 1998, les familles du quintile supérieur (les 20% les plus riches) ont payé plus de la moitié (52.2%) des impôts sur le revenu. C’est là une hausse de 4,2 points par rapport à la décennie précédente.

Comme on le voit, les riches (authentiques ou supposée) fournissent déjà une forte part des rentrées fiscales. Ceux qui les accusent de payer trop peu s’appuient sur un mythe. À long terme, le seul effet prévisible d’une imposition excessive est la diminution graduelle du nombre de contribuables fortunés.

L’État sacrifierait sa propre poule aux oeufs d’or s’il tentait de faire porter aux nantis le fardeau d’une hausse massive des dépenses publiques. La seule solution viable: accroître les revenus de tous les citoyens par la croissance économique.

 

Michel Kelly-Gagnon est président de l’IEDM.

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