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Textes d'opinion

Radiographie de l’État-providence

On entend souvent dire que les programmes sociaux ont été «démantelés» au Québec ces dernières années. Qu’en est-il vraiment? L’Institut économique de Montréal (IEDM) dévoile cette semaine une Note économique, rédigée par ma collègue Norma Kozhaya, qui trace un portrait de la situation de façon à ce que le débat sur le rôle de l’État se fasse sur des bases réalistes et non à partir de perceptions fausses ou biaisées.

En gros, il est faux de prétendre que l’État a subi une cure d’amaigrissement draconienne. En 1994, le gouvernement s’est retrouvé avec un déficit record de presque 6 milliards (G$), une situation intenable. De 1994 à 1997, les dépenses de programmes (toutes sauf le service de la dette) ont alors effectivement été réduites de 1,65 G$, soit de 4,5% par rapport à leur niveau de 1994.

Toutefois, ces baisses ont vite été plus que compensées au cours des années suivantes. En effet, la hausse est de 7,9 G$ entre 1997 et 2002. En comparaison, les compressions en Alberta ont atteint 22% entre 1993 et 1997. Même en tenant compte de l’inflation, on observe qu’il y a eu une diminution de 8,3% de 1994 à 1997, compensée par la suite par une augmentation de 11,3% entre 1997 et 2002, de sorte que, dès 2001, on retrouve un niveau de dépenses réelles légèrement supérieur à celui de 1994. Mais, plus encore, si l’on tient compte de la croissance démographique, on constate que les dépenses réelles de programmes par habitant n’ont jamais été affectées de façon significative. Elles sont estimées à 5080 $ pour 2002-03, un niveau inférieur de 1% seulement par rapport à celui atteint avant les compressions initiées en 1994.

On peut faire le même exercice en examinant les ressources que les deux paliers de gouvernement consacrent à chaque citoyen pour ce qui est des programmes sociaux seulement. Entre 1991 et 1998, les dépenses sociales par habitant au Québec ont effectivement diminué, mais d’un modeste 0,6% en termes réels (elles ont donc augmenté en dollars courants). Cette stagnation relative des années 1991 à 1998 succède toutefois à des augmentations spectaculaires au cours des trois décennies précédentes.

De 1961 à 1998 les dépenses sociales réelles par personne ont augmenté de 377%! Par ailleurs, depuis 1998, les transferts fédéraux ont augmenté, tout comme les dépenses provinciales en santé et en éducation.

De nouvelles politiques familiales plus généreuses ont également été instaurées. On constate ainsi que les dépenses sociales réelles par personne ont augmenté de 1,5% pour se situer à 6368 $ en 2001. Cette hausse récente efface donc l’effet des compressions appliquées au milieu des années 1990.

Quant aux dépenses dans le secteur de la santé, en dollars constants, elles ont diminué pour les années 1995 et 1996, de 1,5% et 5% respectivement, mais augmenté de 19% au total au cours de la décennie 1991-2001. Les dépenses réelles en santé par habitant sont donc passées de 1 701 $ en 1991 à 1931 $ en 2001, après avoir atteint un plancher de 1 627 $ en 1996 à la suite des compressions les plus importantes.

En fin de compte, si l’on prend comme référence les dépenses publiques, qu’elles soient générales ou spécifiquement «sociales», rien ne semble justifier l’affirmation voulant qu’il y a eu un retrait majeur de l’État au cours des années 1990.

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