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Finances publiques : l’Ontario ressemble de plus en plus au Québec

Puisque que les gouvernements des deux plus grosses provinces présentaient ce printemps leurs derniers budgets avant les prochaines élections – l’Ontario tiendra les siennes en juin et le Québec en octobre –, on pouvait s’attendre à ce qu’ils fassent pleuvoir les millions, et c’est ce qui est arrivé.

Cependant, bien que le Québec a longtemps été reconnu pour le piètre État de ses finances publiques (déficits à répétition, dépenses considérables et impôts élevés), son gouvernement a au moins commencé à faire le ménage. Il semble maintenant que l’Ontario, qui a longtemps été le moteur économique du pays, soit déterminé à lui ravir la palme de l’insouciance financière.

En dépit du petit surplus qu’il a dégagé l’an dernier, le gouvernement ontarien accusera un déficit de 6,7 milliards $ en 2018-2019 et ne prévoit pas retrouver l’équilibre budgétaire avant 2024-2025. Sa dette nette s’élève maintenant à plus de 300 milliards $, ou 37 % du PIB, un ratio qui recommencera à augmenter au cours des prochaines années.

Le gouvernement du Québec présente de son côté des budgets équilibrés depuis trois ans et vient tout juste d’annoncer qu’il remboursera 10 milliards $ de sa dette au cours des cinq prochaines années. Sa dette nette de plus de 180 milliards $, ou presque 44 % du PIB, demeure plus élevée que celle de son voisin en proportion de la taille de son économie, mais on prévoit que ce ratio continuera à décroître. En fait, les ratios de la dette nette des deux provinces par rapport à leur PIB respectif continuent à se rapprocher.

Compte tenu de l’évolution de l’endettement des deux provinces, on est moins surpris d’apprendre que les frais d’emprunt du gouvernement du Québec, au début avril 2018, ont été pour la toute première fois inférieurs à ceux du gouvernement de l’Ontario. Pour une obligation de 10 ans, le taux du Québec était de 2,82 %, soit cinq points de base de moins que le taux ontarien de 2,87 %. À la mi-avril, une importante agence de crédit a d’ailleurs changé sa perspective des finances de la province, la faisant passer de « stable » à « négative », en raison de la décision du gouvernement ontarien d’engendrer des déficits de plusieurs milliards pour les six prochaines années fiscales. Même si la dette du Québec demeure plus élevée, ce qui compte est que la province est sur la bonne voie, tandis que la dette de l’Ontario augmente.

Des dépenses en hausse

Au chapitre des dépenses aussi, l’Ontario a imité la performance douteuse du Québec, ses dépenses étant passées de 13,1 à 16,8 % du PIB au cours des quinze dernières années, en excluant les paiements d’intérêt sur la dette, une hausse de 28 %. Au Québec, ces mêmes dépenses sont passées de 19,3 à 23 % du PIB durant la même période, une augmentation de 19 %.

Évidemment, pour couvrir ces hausses de dépenses, les recettes ont elles aussi augmenté dans les deux provinces. En Ontario, elles sont passées de 15,1 à 17,7 % du PIB entre 2002-2003 et 2016-2017. Le Québec ne s’est pas laissé damer le pion : ses recettes sont passées de 18,5 à 19,8 % du PIB durant la même période.

Les deux provinces ont un autre point commun depuis quelques années : les paiements de péréquation qu’elles reçoivent du gouvernement fédéral. L’Ontario a commencé à recevoir de tels paiements, conçus pour corriger les « disparités fiscales entre les provinces », en 2009-2010. Ceux-ci ont augmenté ensuite au point de dépasser les 3 milliards $ pendant deux ans, mais ils ont diminué depuis et représentaient un peu moins de 1 milliard $ cette année. Le Québec, en revanche, reçoit près de 12 milliards $ à ce titre.

Le gouvernement de l’Ontario grossit

Le portrait qui ressort de ces comparaisons est limpide : tant en ce qui a trait à la dette, aux dépenses qu’à la taxation, l’Ontario ressemble de plus en plus au Québec. Cette convergence peut s’expliquer en partie par la meilleure performance affichée par le Québec ces dernières années, surtout en matière d’équilibre budgétaire et de réduction du ratio de sa dette nette par rapport au PIB. Cependant, une partie beaucoup plus grande du rapprochement des situations du Québec et de l’Ontario est due à la détérioration des finances publiques de ce dernier depuis une quinzaine d’années, ce qui fait que le gouvernement de l’Ontario prend maintenant beaucoup plus de place dans l’économie de la province.

Malgré les progrès récents du Québec, les deux provinces souffrent d’une dépendance à l’impôt, aux dépenses et aux emprunts. Elles devront en particulier s’attaquer à leurs lourdes dettes par de futurs impôts, une perspective qui devrait inquiéter tous ceux qui se préoccupent de la prospérité et du bien-être à long terme des citoyens des Québécois et des Ontariens.

Jasmin Guénette is Vice President of Operations at the Montreal Economic Institute, Mark Milke is an independent policy analyst. They are the authors of “Ontario vs. Quebec: Whose Public Finances Are Worse?” and the views reflected in this op-ed are their own.

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