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Budget 2018 : quand Montréal manipule les chiffres

Le budget 2018 de la Ville de Montréal a été déposé ce 10 janvier. On y apprend que la charge fiscale d’un propriétaire d’une résidence de valeur moyenne montera en de 3,3 % par rapport à 2017. L’explication des détails de cette augmentation m’a cependant laissé pantois. Selon le document budgétaire et tous les reportages que j’ai pu lire sur le sujet, ce 3,3 % serait dû à une hausse de l’impôt foncier de 1,9 %, de la taxe d’eau de 1,1 % et de la taxe d’arrondissement de 0,3 % (voir le Budget 2018 de la Ville à la page 32).

C’est tout simplement impossible.

Prenons un exemple simple pour le comprendre. Supposons que vous payez 1000 $ par année en impôt provincial et 1000 $ d’impôt fédéral. Si chaque palier de gouvernement augmente vos impôts de 10 % (soit 100 $), vous payez maintenant 200 $ de plus, soit 10 % de 2000 $. Il ne viendrait à l’idée de personne de dire que Québec et Ottawa ont chacun augmenté vos impôts de 5 % pour un total de 10 %.

C’est pourtant ce que les autorités imaginatives de Montréal ont fait, en additionnant la hausse de chacune de ces taxes en proportion du montant total du compte de taxes, et non en calculant séparément la hausse de chacune de ces taxes. C’est en le faisant qu’on prend la mesure de l’augmentation de taxes à laquelle sont soumis les contribuables montréalais.

Puisque la Ville, dans son budget, n’a inclus que les montants des taxes qui seront payées en 2018, on doit faire un petit calcul pour trouver le montant de ces mêmes taxes en 2017. C’est heureusement assez simple.

Le montant qu’il faut retenir est 3611 $. C’est le compte de taxes municipales moyen payé l’an dernier à Montréal. On sait déjà que ce compte de taxes passera à 3729 $ cette année, une hausse de 118 $, ou 3,3 %.

  • La taxe foncière fera augmenter le compte de taxes de 1,9 %. Sur le compte moyen de 3611 $, cela doit représenter une hausse de 69 $. Dans son récent budget, la Ville indique que le montant moyen pour la taxe foncière sera de 2818 $ cette année. Le montant à ce chapitre l’an dernier était donc de 2749 $, et l’augmentation doit être calculée à partir de celui-ci. Sur ce montant de 2749 $ donc, la variation de 69 $ représente en réalité une hausse de 2,5 % de la taxe foncière, et non 1,9 %.

On peut faire le même exercice avec la taxe d’eau et la taxe d’arrondissement.

  • La taxe d’eau fera augmenter le compte de taxes total de 1,1 %, ce qui doit représenter 40 $ du compte moyen de 3611 $, mentionné plus haut. Or, comme la taxe d’eau sera de 434 $ en 2818, elle devait donc se situer à environ 394 $ en 2017. La hausse de la taxe d’eau est donc en réalité de 10,1 %, et non de 1,1 %.
  • La taxe d’arrondissement aide à faire augmenter le compte total  moyen de 3611 $ de 0,3 %, ou 11 $. Comme elle se situe en 2018 à 463 $, cette dernière taxe devait donc être d’environ 452 $ en 2017. L’augmentation réelle de la taxe d’arrondissement est donc de 2,4 %, et non de 0,3 %.

Quand la Ville écrit noir sur blanc à la page 32 de son budget que ces mêmes variations sont de 1,9 %, de 1,1 % et de 0,3 %, ce n’est tout simplement pas vrai.

On peut arriver à peu près aux mêmes résultats en utilisant les chiffres du budget de 2017 de la Ville comme point de départ (p. 39). Le budget prévoyait alors un compte de taxes de 3611 $ ventilé comme suit :

  • 2744 $ pour la taxe foncière;
  • 397 $ pour la taxe d’eau;
  • 454 $ pour la taxe d’arrondissement.

Lorsqu’on calcule la différence pour ces taxes entre le budget de cette année et celui de l’an dernier, on arrive avec une variation de 2,7 % pour la taxe foncière, de 9,3 % pour la taxe d’eau et de 2 % pour la taxe d’arrondissement, pour une moyenne pondérée de 3,3 %.

Ce n’est pas exactement la même répartition, mais c’est tout près. (Il est probable que les chiffres utilisés pour le budget de l’an dernier aient été mis à jour). Peu importe la raison, et peu importe la façon dont on le calcule – voir les tableaux ci-joints –, il n’y a pas de doute possible : les variations des hausses de taxes sont supérieures à ce que la Ville indique dans son budget cette année.

Résumons :

Le compte de taxes global du propriétaire montréalais devrait augmenter de 3,3 % en 2018. Cette augmentation est la moyenne (pondérée) de la hausse de trois taxes :

  • une hausse de 2,5 % de la taxe foncière;
  • une hausse 10,1 % de la taxe d’eau;
  • une hausse de 2,4 % de la taxe d’arrondissement.

Prétendre que la croissance de la taxe foncière a été limitée sous le taux d’inflation prévu (2,1 %) est donc tout simplement faux. Cette taxe, la taxe d’eau et la taxe d’arrondissement augmentent toutes bien plus rapidement que ce que la Ville prétend, et ces augmentations sont présentées d’une façon pour le moins douteuse par les autorités municipales, pour ne pas dire malhonnête.

Germain Belzile is a Senior Associate Researcher at the MEI. The views reflected in this op-ed are his own.

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