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Assurance-médicaments 100 % publique : une mauvaise idée et voici pourquoi

Une coalition lance aujourd’hui une campagne web pour une « assurance médicaments publique à 100 % ». L’organisme – qui a probablement de très bonnes intentions – vise à recevoir l’appui d’au moins 10 000 Québécois qui sont ensuite invités à écrire une lettre, en ligne, à leur député.

C’est une très mauvaise idée, et voici pourquoi.

Un argument souvent évoqué est qu’un monopole public d’assurance médicaments permettrait à l’État de faire des économies, notamment en lui procurant un pouvoir de négociation supérieur auprès des compagnies pharmaceutiques, ce qui permettrait de mieux contenir les coûts des médicaments. Mais les tenants d’un tel régime oublient de souligner un fait crucial : les fameuses économies seraient obtenues par le biais d’un plus grand rationnement et non par une plus grande efficacité.

Comme le montrait mon collègue Yanick Labrie en août dernier, les expériences de pays ayant adopté un tel modèle peuvent servir d’avertissement. Depuis les années 1990, les patients au Royaume-Uni subissent les contrecoups des politiques de maîtrise de dépenses de leur régime d’assurance médicaments public. Les patients anglais ont dû se passer pendant de nombreuses années de médicaments pourtant disponibles partout à travers l’Europe.

En Nouvelle-Zélande, l’accès des patients aux nouveaux médicaments est tout aussi restreint qu’au Royaume-Uni, sinon davantage. Or, de nombreux rapports font état des conséquences négatives pour la santé qu’ont entraînées les politiques de plafonnement des dépenses adoptées dans ce pays depuis une vingtaine d’années.

Au Québec, le régime repose sur une mixité d’assureurs (public et privé). Les coûts du régime d’assurance médicaments ont augmenté depuis sa mise en œuvre, mais c’est en bonne partie, justement, parce que le Québec a résisté plus que les autres provinces à la tentation de rationner l’accès aux nouveaux médicaments.

C’est d’ailleurs ce qui explique qu’au Québec on retrouve la couverture la plus généreuse quand on compare les régimes d’assurance médicaments publics provinciaux, avec 38 % des médicaments homologués par Santé Canada entre 2004 et 2012 qui sont remboursables, par opposition à 23 % en moyenne à travers le pays.

Si la population québécoise dépense davantage en médicaments que celle des autres provinces, c’est essentiellement parce que le nombre de prescriptions y est plus élevé, et non à cause des prix plus élevés pour les médicaments. Notons aussi que ces dépenses de médicaments plus grandes s’accompagnent de dépenses moindres dans le système public de santé. Comme le taux d’hospitalisation diminue depuis le début des années 2000, on peut en déduire que des thérapies pharmaceutiques plus accessibles au Québec ont vraisemblablement remplacé d’autres types de traitements médicaux plus coûteux, comme les chirurgies en milieu hospitalier.

Des politiques qui restreignent l'accès aux nouveaux médicaments pénaliseraient tous les Québécois de la même façon. Nous avons un modèle qui est de loin préférable à un monopole 100 % public, gardons-le ainsi. 

Michel Kelly-Gagnon is President and CEO of the Montreal Economic Institute. The views reflected in this column are his own.

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