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Le nouveau régime forestier crée de l’incertitude

Dans les prochaines semaines, la présidente du Chantier sur l'amélioration à apporter à la mise en oeuvre du nouveau régime forestier, Mme Paule Têtu, déposera son rapport final avec ses critiques et recommandations.

À la suite de nombreuses consultations avec les acteurs touchés par ce nouveau régime entré en vigueur l'année dernière, Mme Têtu a présenté des conclusions préliminaires peu rassurantes lors du congrès annuel du Conseil de l'industrie forestière du Québec en mai dernier.

Le portrait dressé par les acteurs du milieu forestier semble assez préoccupant. Mais comment en somme nous arrivés à cette situation? Il faut tout d'abord comprendre l'évolution des régimes forestiers et leur impact sur le couvert forestier québécois.

Anciennement, le régime des concessions accordait de facto aux concessionnaires un droit de propriété sur les arbres se trouvant sur les territoires concédés par l'État. Dans la mesure où ils s'acquittaient de leurs responsabilités et payaient les redevances, ils pouvaient conserver leurs concessions sans limite de temps et donc, planifier leurs activités d'aménagement à long terme.

Contrairement à certains mythes, il n'y avait aucune surexploitation de la forêt à cette époque. Au contraire, dans les années 1970, le gouvernement reprochait aux compagnies forestières de sous-exploiter la matière ligneuse et affirmait la nécessité de prendre en charge la forêt pour susciter plus d'activité économique. C'est à ce moment que le régime des CAAF (contrat d'approvisionnement et d'aménagement forestier) a été mis en place.

Ce n'est qu'après l'abolition des concessions et l'augmentation des droits de coupe qu'on a observé quelques dépassements de la possibilité forestière, une mesure qui détermine le volume maximum que l'on peut prélever annuellement sans diminuer la capacité productive du milieu forestier.

Cette hausse de la récolte survenue sous le régime des CAAF a marqué un tournant dans la gestion de la forêt publique au tournant des années 2000, alors que le film L'Erreur boréale et différents rapports évoquaient l'hypothèse d'une surexploitation. Étonnamment, bien que cette situation ait été en majeure partie attribuable à l'intervention gouvernementale, elle justifiera une prise en charge presque totale par l'État, qui s'est concrétisée dans le régime forestier entré en vigueur en 2013.

Alors que les entreprises avaient des incitations financières à long terme à aménager la forêt en considérant sa pérennité sous le régime des concessions et, jusqu'à un certain point, sous celui des CAAF, elles n'ont plus aujourd'hui aucune autonomie et doivent se contenter de suivre les directives des agences du gouvernement d'une année à l'autre. De plus, les nouvelles garanties d'approvisionnement sont accordées pour une durée de cinq ans ou moins selon la volonté du ministre.

La lenteur bureaucratique, la courte durée des contrats ainsi que la nature changeante des objectifs politiques a fait en sorte d'accroître considérablement le niveau d'incertitude à laquelle l'industrie est confrontée, ce qui pourrait décourager l'investissement et entraîner des pertes d'emplois.

Les données disponibles montrent que la forêt québécoise n'est aujourd'hui aucunement en danger de surexploitation. En fait, ce n'est pas tant la forêt qui est en danger, mais davantage le dynamisme d'un important secteur économique qui emploie actuellement plus de 60 000 Québécois et qui représente 2,1% du PIB, soit plus que les secteurs des mines et de l'énergie.

Jasmin Guénette is Vice President of the Montreal Economic Institute. The views reflected in this column are his own.

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