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Op-eds

Étudier sous protection policière

Le conflit du boycott étudiant dégénère. Les « carrés rouges » ne sont plus seulement des étudiants (en fait, la vaste majorité des étudiants sont en classe ou ont terminé leur session). Se joignent au mouvement des intellectuels, des professeurs, des artistes et des syndicalistes et des militants de tous horizons. Et dans leurs revendications, il n'est plus vraiment question du débat sur le financement des universités et sur l'accessibilité aux études. Le mouvement remet en cause les fondements du contrat social : on ne fait plus confiance aux politiciens élus, on désavoue ses propres leaders, on n'obéit pas à la justice!

On semble sortir complètement d'un débat normal et sain sur les politiques publiques pour entrer dans le dangereux monde du « jusqu'au boutisme ». Dans le débat sur l'accessibilité aux études, les « carrés rouges » ont perdu la bataille intellectuelle puisqu'aucune étude sérieuse ne soutient leur point de vue. Aucune. Au contraire, les propositions du gouvernement accroissent l'accessibilité aux études. Ils ont aussi perdu la bataille de l'opinion publique puisque la majorité de la population ne les soutient pas.

Ne leur reste-t-il que l'extrémisme intolérant? Violer les droits des autres n'est pas un moyen de pression légitime et ne doit jamais l'être dans une démocratie libérale. Pour faire respecter les injonctions, devra-t-on faire appel aux policiers? Cela me rappelle un événement marquant de l'histoire des États-Unis. En juin 1963, le Président Kennedy avait dû dépêcher la Garde nationale pour escorter deux étudiants noirs qui allaient étudier à l'Université de l'Alabama. Le Gouverneur George Wallace s'était alors interposé physiquement en se tenant devant la porte de l'auditorium pour marquer son désaccord envers l'intégration raciale.

Qu'on lutte pour quelque cause que ce soit, les actions posées doivent respecter les droits et libertés d'autrui. Si ce n'est pas le cas, les citoyens lésés peuvent s'adresser aux tribunaux pour les faire respecter, comme ce fut le cas pour chacune des injonctions ordonnant la reprise des cours. L'injonction accordée à Laurent Proulx fut d'ailleurs respectée à l'Université Laval. Ce ne fut toutefois pas le cas pour de nombreux autres ordres des cours de justice. Les carrés rouges choisissent sciemment de bafouer les droits des étudiants qui souhaitent simplement retourner en classe sans être inquiétés. C'est immoral.

Chaque fois que je vois des poignées de « carrés rouges » bloquer physiquement l'accès de leurs collègues aux salles de cours, ce parallèle troublantavec l'intégration raciale en Alabama s'impose à mon esprit. Là où l'on violait le droit des noirs il y a 49 ans en raison de la couleur de leur peau, on viole aujourd'hui le droit des étudiants en raison de leur opinion et leur choix différents.

Pour paraphraser la fin dela déclaration de Kennedy, à l'époque : il est impératif qu'il soit permis aux étudiants québécois, quelle que soit leur opinion, de fréquenter une institution publique sans devoir être protégés par la police.

Youri Chassin is an Economist at the Montreal Economic Institute.

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