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Une question de volonté

Les déficits sont la préoccupation de l’heure tant au niveau provincial que fédéral. Face aux chiffres qui gonflent rapidement, nos ministres des Finances commencent par prendre un air étonné, puis s’agitent dans tous les sens, comme des poules sans tête, dans l’espoir de trouver un coupable et une solution.

Traditionnellement, quand les finances publiques se portent bien, c’est grâce à la sagesse, à la prudence et à la grande capacité de discernement des ministres des Finances, mais quand elles vont mal, c’est à cause de l’économie, des paradis fiscaux ou du travail au noir. Aujourd’hui encore, Ottawa et Québec s’efforcent de nier toute responsabilité et attribuent les résultats financiers pitoyables à la crise économique. Certes, les recettes fiscales diminuent en période de récession, mais les gouvernements ne sont pas d’innocentes et frêles victimes d’une conjoncture assassine.

En dépit des discours creux qu’on nous sert, il est clair que si nos finances publiques se détériorent, c’est principalement en raison de choix budgétaires médiocres. Quand les coffres de l’État sont vides, c’est la faute à ceux qui ont le pouvoir de dépenser!

Les déficits sont donc le produit d’une volonté politique. En l’occurrence, l’État fédéral a adopté le Plan d’action économique dont la facture dépassera 30 milliards, il a dépensé 10,6 milliards pour «sauver» l’industrie automobile, 3,4 milliards pour acheter des hélicoptères Chinook, 5 milliards pour une nouvelle flotte de combat pour l’armée de terre, 1 milliard pour aider les producteurs de «liqueur noire», sans compter les subventions et autre formes d’aide accordées aux innombrables groupes de pression.

Quant à la fonction publique fédérale, son effectif a augmenté de 4,5% depuis un an, tandis que les salaires qu’elle verse grimpent plus rapidement que dans le reste de l’économie. Tout cela est-il bien raisonnable? Au niveau provincial, le bilan n’est guère plus reluisant. D’une part, nous savons que l’équilibre budgétaire n’a jamais existé. C’était un mirage résultant d’entourloupes fiscales savamment imaginées. D’autre part, le budget légué par madame Jérôme-Forget ainsi que les autres initiatives de relance de l’économie coûteront 15 milliards $!

Malgré tout, le ministre provincial Raymond Bachand tente de minimiser la gravité de la situation en citant l’exemple de l’Ontario dont le déficit atteindra 24,7 milliards. Quand on se compare, on se console, nous dit-on. Certes! Mais dans ce cas-ci, quand on se compare, on se désole, car il faut préciser que la dette nette de la belle province atteint 42% du PIB, contre seulement 25% en Ontario. En fait, seule Terre-Neuve affiche un ratio plus élevé que le Québec. Monsieur le ministre n’a donc vraiment pas de quoi pavoiser!

À Ottawa, on tente également de manipuler bassement l’opinion publique en comparant la dette fédérale à celle de Washington. Quelle imposture! L’Oncle Sam est techniquement en faillite, et c’est à lui qu’on se compare?!

Maintenant, pour éponger les déficits qu’ils ont générés, nos ministres des Finances lorgnent en direction de nos poches. Le ministre Bachand a même déclaré que les Québécois devront «mettre l’épaule à la roue». Ah, oui? Et pourquoi devrions-nous accepter? Pourquoi est-ce encore à nous de faire les frais d’excès budgétaires destinés en partie à satisfaire les intérêts égoïstes des lobbies?

Messieurs les ministres des Finances, vous avez trop dépensé? Soit! Mais ne touchez pas à nos poches. Comment voulez-vous que les Québécois dépensent pour faire «rouler» l’économie si leurs portefeuilles sont vides? Faites donc la seule chose qu’un gouvernement responsable devrait faire: couper les dépenses! Quand on veut, on peut …

Nathalie Elgrably-Lévy is Senior Economist at the Monreal Economic Institute.

* This column was also published in Le Journal de Québec.

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