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La mondialophobie

La semaine dernière, je prenais la défense des produits importés en les comparant à un cadeau du Père Noël, car ils permettent d’augmenter l’éventail de choix des consommateurs, ainsi que leur pouvoir d’achat.

Évidemment, les mondialophobes se fichent de savoir que notre dollar va plus loin grâce aux importations bon marché, et réclament inlassablement la « protection » de l’État. Mais une protection contre quoi? Contre la fraude, la violence ou l’oppression? Non! Ils veulent une protection contre les bas prix! Ils veulent limiter les importations, car elles causeraient des pertes d’emplois.

Si le Canada se met à importer des autos chinoises, des travailleurs locaux de l’industrie automobile pourraient, certes, être licenciés. Ces pertes d’emplois sont visibles et les médias s’empresseront de couvrir la nouvelle tant le mandat est simple à remplir. Les victimes se trouvent toutes au même endroit et il suffit de se poster avec un micro à la sortie de l’usine pour recueillir les témoignages des travailleurs. Conclure que les importations causent du chômage semble alors inévitable. Or, c’est tout le contraire.

Si les autos chinoises coûtent moins cher, le pouvoir d’achat des consommateurs augmente, et ils pourront acheter davantage d’autres biens. Ils iront plus souvent faire du ski, manger au restaurant ou relaxer dans les spas. Des emplois seront donc nécessairement créés dans d’autres secteurs de l’économie. Mais ce n’est pas tout.

Les autos chinoises n’apparaissent pas dans notre garage par l’opération du Saint-Esprit. Il faut des travailleurs pour étudier le marché québécois, commander les autos appropriées, les transporter jusqu’ici, et les vendre. Il faut concevoir et réaliser des publicités, et il faut des acteurs pour leur donner vie.

Créer des emplois

Et si le Québec compte davantage de véhicules en circulation, il faudra créer des emplois de mécaniciens, tandis que les entreprises qui fabriquent tous les produits disponibles dans le rayon « automobile » des grandes surfaces devront embaucher davantage de personnel pour pouvoir répondre à la hausse de la demande.

Si les importations détruisent certains emplois, elles ne sont donc pas pour autant source de chômage, car elles en créent également de nombreux autres. Mais les emplois créés ne sautent pas aux yeux et on ne verra jamais un journaliste faire un reportage sur un travailleur qui décroche un emploi grâce aux nouvelles opportunités générées par les importations chinoises!

Par contre, les mondialophobes galvaudent leur discours sur tant de tribunes que certains finissent par y croire. Pourtant, c’est un discours souvent entretenu par des producteurs ou des travailleurs qui, après avoir été protégés pendant des décennies grâce aux barrières commerciales, auraient à relever d’importants défis advenant l’ouverture des frontières.

Leur opposition aux produits chinois n’est ni altruiste ni noble. Elle est purement égoïste!

Le protectionnisme : une spoliation

On devrait évidemment aider de notre mieux les travailleurs licenciés en raison de la concurrence étrangère, mais on devrait catégoriquement refuser de concéder à une industrie des avantages dont le reste de la société fait les frais. Le protectionnisme est une spoliation exercée par quelques producteurs sur le reste de la population grâce à des mythes savamment entretenus.

Ouvrir les frontières n’est donc rien de plus que l’abolition de ces privilèges spoliateurs. C’est la victoire du « petit monde » sur les industries qui font payer à l’ensemble de la société leur peur de la concurrence étrangère.

C’est la victoire de ceux qui travaillent dur et qui en veulent plus pour leur argent. Est-ce une perspective si terrible que ça?

* This column was also published in Le Journal de Québec.

Nathalie Elgrably is an Economist at the Montreal Economic Institute and author of the book La face cachée des politiques publiques.

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