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Une histoire qui se répète

La contrebande de cigarettes est actuellement en plein essor, si bien que les autorités déploient des efforts importants pour la contenir.

Pourtant, ce phénomène n’est pas nouveau. La GRC s’était déjà attaquée au problème en 1951 et au début des années 1990. Aujourd’hui, un autre rapport révèle que 25 % des cigarettes achetées proviendraient de la contrebande. Ce qui n’a rien de surprenant quand on sait qu’une cartouche de contrebande coûte 50 $ de moins qu’une cartouche vendue légalement.

Dans l’espoir de contrer le problème, la GRC s’attaque aux têtes dirigeantes des réseaux de contrebande, tandis que certaines organisations, comme l’Association pour les droits des non-fumeurs, demandent au gouvernement d’être plus sévère. Tous ces gens sont certainement bien intentionnés, mais n’ont-ils donc tiré aucune leçon du passé?

L’histoire ne leur a-t-elle donc pas appris que quel que soit le nombre de perquisitions qu’elle effectue, la GRC ne réussira pas à enrayer le marché noir? Au mieux, elle incitera les contrebandiers à être plus vigilants et à redoubler d’imagination pour déjouer les autorités.

Identifier la cause

Pour faire disparaître efficacement le marché noir, il faut en identifier la cause. Qu’il s’agisse de la contrebande de 1951, de 1993 ou de celle d’aujourd’hui, ce sont les taxes élevées qui permettent aux contrebandiers de réaliser des gains substantiels. Tant que les taxes sont élevées, le marché noir est lucratif et les efforts de la GRC restent vains.

D’ailleurs, en 1952, c’est grâce à une réduction des taxes sur le tabac qu’Ottawa a réussi à maîtriser la contrebande. Même scénario en 1994 alors que les contrebandiers sont «mis en faillite» après une réduction des taxes sur le tabac faisant passer la cartouche de 47 $ à 23 $.

L’histoire se répète

Aujourd’hui, l’histoire se répète. Évidemment, la contrebande préoccupe le trésor public car elle entraîne une baisse des recettes fiscales.

Mais elle confirme un concept vieux de deux siècles et que l’économiste américain Arthur Laffer a rendu populaire dans les années 1970, à savoir que trop d’impôt tue l’impôt. Ainsi, quand les taxes deviennent excessives, l’État récolte moins de recettes, car les gens effectuent leurs transactions à l’abri du regard du fisc. Le cas des cigarettes est éloquent et la leçon à en tirer est claire.

Toutefois, ce phénomène ne se limite pas aux produits du tabac. Il s’étend également à l’impôt sur le revenu. Revenu Québec évalue d’ailleurs à près de 3 milliards les revenus perdus en raison du travail au noir, une pratique que les travailleurs choisissent généralement pour éviter de partager le fruit de leur labeur avec le fisc lorsque ce dernier devient trop gourmand.

Aujourd’hui, journée du dépôt du budget, plusieurs voix s’élèvent pour que Madame Jérôme-Forget ne réduise pas les impôts. Or, nous sommes les contribuables les plus taxés en Amérique du Nord et nous vivons dans l’une des régions les plus pauvres du continent.

De toute évidence, notre approche est déficiente et il est temps de penser autrement. Tout comme la réduction des taxes sur le tabac a permis l’augmentation des recettes fiscales, la réduction des impôts permettra de stimuler l’activité économique, de réduire l’évasion fiscale et de regarnir les coffres de l’État.

Les baisses d’impôts entreprises par le gouvernement américain en 2001 et 2003 ont eu pour effet d’augmenter considérablement les recettes fiscales et de réduire de moitié le déficit. Pourquoi ne pas tenter la même expérience? Nous n’avons rien à perdre!

* This column was also published in Le Journal de Québec.

Nathalie Elgrably is an Economist at the Montreal Economic Institute and author of the book La face cachée des politiques publiques.

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