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Un mirage, les économies des fusions

Dans quelques semaines, les Montréalais et d’autres citoyens aux quatre coins du Québec éliront les maires et conseillers municipaux qui auront à gérer de nouvelles villes aux dimensions élargies. Ces changements de structures politiques ont des effets économiques certains et on peut se demander si les contribuables y gagneront au change. L’argument de la réduction des coûts et de l’efficacité économique fait partie des principales justifications données par la ministre Louise Harel pour imposer cette réorganisation. La théorie économique est clairement en désaccord: les fusions non seulement n’engendreront pas d’économies, elles risquent de créer des entités qui coûteront plus cher et qui répondront moins bien aux désirs de leurs citoyens.

Dans une Note économique publiée cette semaine, l’Institut économique de Montréal fait le point sur les principaux arguments contre le principe des fusions forcées. En voici quelques-uns.

L’un des mythes les plus tenaces est qu’on puisse faire des économies importantes en réduisant le nombre de maires et de conseillers municipaux. Le chercheur Robert L. Bish de l’Institut C.D. Howe a toutefois comparé les frais de 88 élus et de leur personnel de soutien, au sein de 13 administrations, à ceux de 23 élus au sein d’une administration fusionnée servant la même population. Il conclut que les coûts pour ce type de dépenses comptent pour moins de 1% des dépenses totales. Qui plus est, en raison des salaires plus élevés et du personnel plus important dans la ville fusionnée, les coûts par habitant dans les deux systèmes sont pratiquement identiques.

Au chapitre des services municipaux, les recherches empiriques montrent que les économies d’échelle sont négligeables. Elles touchent des services très spécialisés. Les ententes entre municipalités, qui sont déjà très nombreuses au Québec, permettent de réaliser ces économies sans compromettre l’autonomie des municipalités. Dans le cas de Montréal, ces services étaient déjà administrés par la Communauté urbaine de Montréal (CUM) et la fusion n’apporte donc rien de ce côté.

Dès 1956, un professeur américain, Charles Tiebout, a expliqué dans une étude restée célèbre le lien entre la satisfaction des citoyens et la pluralité des juridictions. Il a montré que s’il existe dans une région urbaine donnée un grand nombre de petites municipalités, les gens pourront «voter avec leurs jambes» en s’établissant ou en déménageant dans les villes qui offrent le niveau optimal de services par rapport au fardeau fiscal. Certains seront prêts à payer des impôts plus élevés pour que leur administration municipale soit plus interventionniste; d’autres préféreront des services moins élaborés à moindre coût.

Dans ce contexte, chaque citoyen sera plus à même de trouver une communauté qui lui convient. Comme dans un marché privé, la concurrence a donc des effets positifs.

Il est maintenant trop tard pour faire marche arrière, mais ce débat devra sans doute être repris avec des arguments économiques mieux fondés dans les années qui viennent, lorsqu’on se rendra compte que les bénéfices anticipés par ces fusions forcées n’auront pas été au rendez-vous.

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